«Bien vieillir»: la proposition de loi adoptée.

AURORE BERGÉ, Ministre des Solidarités et des Familles, a rappelé « qu’en 2030, un Français sur trois aura plus de 60 ans et pour la première fois de notre histoire, les plus de 65 ans seront plus nombreux que les moins de 15 ans ».

Avec le vieillissement de la population naissent de nouveaux besoins et c’est toute notre société qu’il faut repenser afin de l’adapter au mieux aux personnes âgées, et c’est sur cette thématique que le gouvernement a décidé de se mobiliser en proposant une loi portant les « mesures pour bâtir la société du bien-vieillir » qui a été très largement adoptée en première lecture, le 23 novembre 2023, par 116 voix contre 31.

Ladite proposition de loi comprend différentes mesures pour prévenir la perte d’autonomie et lutter contre l’isolement des personnes âgées ou handicapées, mieux signaler les maltraitances, faciliter et mieux rémunérer le travail des aides à domicile, mais aussi des dispositions sur les Ehpad et l’habitat inclusif qui complètent le texte.

     1.    Lutter contre l’isolement des personnes âgées ou handicapées

Ce point principal vise à prévenir la perte d’autonomie des personnes âgées. Elle prévoit notamment la création d’une Conférence nationale de l’autonomie. Cette nouvelle instance aura pour mission de piloter la politique de prévention et d’en détailler les fonctions. Elle pourra s’appuyer sur un « centre national de preuves de prévention de la perte d’autonomie et de ressources gérontologiques ». Ce dernier aura notamment pour rôle d’identifier les aides ou nouvelles technologies favorisant notamment « le soutien à domicile ».

Afin de lutter contre l’isolement social des personnes âgées (d’après la Drees, plus de 500.000 personnes ne voient jamais leurs amis ou leur famille) et mieux les informer, par exemple, en cas de crise sanitaire ou de canicule, l’article 2 prévoit que les services sociaux et sanitaires pourront accéder aux registres des personnes vulnérables tenus par les mairies. De leur côté, les mairies pourront accéder aux fichiers des bénéficiaires de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA), de la prestation de compensation du handicap (PCH) et des personnes en GIR 5 et 6, avec leur accord.

Un « référent prévention » (salarié ou bénévole) devra être désigné dans les structures pour personnes âgées ou handicapées (établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes – Ehpad, maisons de retraite…).

     2. Prévention et lutte contre la maltraitance

Les résidents en établissement se voient reconnaitre un droit à recevoir la visite de leur famille et de proches et le maintien d’un lien social. Leur accord écrit préalable au contrôle de leur chambre ou appartement devra être recueilli lors de la conclusion de leur contrat de séjour. Ce contrat devra aussi préciser que leur intégrité psychique est assurée par l’établissement. Un comité d’éthique devra être constitué dans toutes les structures. Le rôle de la personne de confiance (parent, proche, médecin traitant) est précisé.

Une nouvelle instance de recueil et de traitement des alertes en cas de maltraitance de personnes vulnérables est instituée au niveau départemental, sous la responsabilité des agences régionales de santé (ARS). Les mandataires judiciaires à la protection des majeurs, dont les missions sont précisées, pourront saisir cette instance de toute situation de maltraitance. Ils devront respecter une charte éthique.

À l’initiative des députés, un mandat de protection future aux fins d’assistance est créé (le mandat pourra évoluer en fonction du degré d’altération des facultés personnelles de la personne). Pour favoriser le recours à l’habilitation familiale aux fins d’assistance créée en 2019 et en faire une réelle alternative aux mesures de tutelle ou de curatelle, la liste des personnes habilitées à assister ou à représenter un adulte vulnérable est élargie à tout parent ou allié.

     3.    Mesures en faveur des aides à domicile

Une carte professionnelle sera délivrée d’ici 2025 aux aides à domicile intervenant auprès des personnes âgées et handicapées, sur le modèle du caducée des médecins.

Des aides financières annuelles sont créées au profit des départements qui soutiennent les déplacements (en voiture ou en transports en commun) des aides à domicile et favorisent des temps collectifs d’échanges entre professionnels de l’aide à domicile. L’aide financière pour les déplacements sera conditionnée, notamment au montant de l’indemnité kilométrique versée par les départements. Le gouvernement devra remettre deux rapports sur les modalités d’une hausse de l’indemnité du barème kilométrique à hauteur de 45 centimes d’euros du kilomètre pour les aides à domicile et sur le financement du secteur de l’aide à domicile.

Différents amendements ont prévu une expérimentation jusque fin 2027 dans les départements volontaires pour mettre fin à la tarification horaire des services d’autonomie à domicile et la remplacer par une tarification globale.

     4.    Dispositions pour les Ehpad et l’habitat inclusif

Dans le cadre de l’aide sociale à l’hébergement, la proposition de loi supprime l’obligation alimentaire pour les petits-enfants et leurs descendants. Par ailleurs, les enfants d’un parent condamné pour crime ou agression sexuelle contre l’autre parent seront dispensés d’aide alimentaire.

La participation des élus locaux et des usagers est renforcée au sein de leur conseil de la vie sociale (CVS). Les Ehpad publics autonomes devront coopérer dans le cadre de nouveaux groupements territoriaux sociaux et médico-sociaux (GTSMS). Le forfait soins des établissements pourra être mobilisé pour financer des actions de prévention de la perte d’autonomie ou de la dénutrition ou encore en faveur de l’activité physique adaptée. Les députés ont proposé de permettre aux résidents des Ehpad d’accueillir leur animal domestique.

Un amendement prévoit la mise en place d’une réunion régulière des représentants des autorités et des établissements et services compétents en matière de contrôle des Ehpad. Deux autres mesures visent à ne pas renouveler tacitement les autorisations des Ehpad dont l’évaluation externe ou le contrôle de l’ARS n’a pas été satisfaisant et à renforcer le contrôle des Ehpad privés lucratifs et les sanctions en cas de constat du mauvais état d’entretien d’un immeuble ou de travaux non réalisés. De son côté, le gouvernement a fait voter un amendement pour obliger les Ehpad privés lucratifs à consacrer une partie de leurs bénéfices à l’amélioration de l’hébergement et du bien-être de leurs résidents. Un décret devra préciser cette obligation, qui sera applicable au plus tard en 2025.

Un cahier des charges spécifique aux Ehpad, défini par arrêté des ministres chargés des personnes âgées et de l’alimentation, précisera la quantité et à la qualité nutritionnelle des repas proposés.

Les Ehpad privés devront s’inscrire dans le cadre de sociétés à mission, afin de renforcer auprès de ces groupes privés les exigences en termes d’engagements d’intérêt général et d’utilité sociale.

Pour accorder un peu de répit aux proches aidants ou rassurer les personnes âgées vivant seules, l’État pourra instaurer un quota minimal de places réservées à l’accueil de nuit dans les Ehpad, à titre expérimental de 2024 à 2026.

Le gouvernement devra remettre un rapport sur l’opportunité de créer un taux minimal d’encadrement pour les personnels « au chevet » (infirmiers et aides-soignants) pour les personnes âgées.

La proposition de loi contient un dernier volet sur l’habitat inclusif (mode de vie partagé librement choisi par des personnes âgées ou handicapées) : intégration dans le code de la construction et de l’habitat du concept de l’habitat partagé, ajout d’un volet « habitat inclusif » dans les plans départementaux de l’habitat. Le gouvernement devra remettre un rapport sur l’hébergement mixte.

Le gouvernement devra remettre un rapport sur l’opportunité de créer un taux minimal d’encadrement pour les personnels « au chevet » (infirmiers et aides-soignants) pour les personnes âgées.

La proposition de loi contient un dernier volet sur l’habitat inclusif (mode de vie partagé librement choisi par des personnes âgées ou handicapées) : intégration dans le code de la construction et de l’habitat du concept de l’habitat partagé, ajout d’un volet « habitat inclusif » dans les plans départementaux de l’habitat. Le gouvernement devra remettre un rapport sur l’hébergement mixte.

En conclusion :

Ces mesures dédiées aux seniors sont très modestes mais elles marquent une volonté prioritaire du gouvernement et de nos députés de permettre à tous les français de bien vieillir. Cette loi devrait être complétée, au dire de la Première Ministre Mme Élisabeth Borne, par une loi de programmation sur le grand âge qui pourrait être présentée et votée d’ici le troisième trimestre 2024.

Il faut espérer, dans l’intérêt général, que les dispositifs à venir seront complémentaires, innovants et adaptées pour améliorer le choix et les conditions de vie de nos aînés, prendre en compte certains besoins spécifiques, sans oublier de valoriser et de mieux soutenir les professionnels qui les accompagnent au quotidien.

Sources :

  • Assemblée Nationale ;
  • Vie Publique (24 novembre 2023) ;
  • La Gazette (article de Mme Isabelle RAYNAUD) ;
  • AFP 2023.

 

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